mercredi 26 décembre 2012

Construire la Fabrique métropolitaine

Par Luc Gwiazdzinski

Le débat sur la « métropole » engagé dans le cadre de la réforme des collectivités locales, peut parfois s’enliser dans un échange entre élus ou techniciens autour des avantages et inconvénients de la réforme du  « mécano institutionnel ». Chacun pèse le pour et le contre et personne n’échappe aux petits calculs égoïstes.

Certains évoquent les dates butoirs, le besoin de peser ou la nécessité d’obtenir son ticket d’entrée dans le club fermé des « entités-urbaines-qui comptent » avec leur demi-million d’habitants. D’autres s’inquiètent du gigantisme, de la perte d’autonomie, de l’éloignement du pouvoir, de la confiscation démocratique ou craignent « d’être mangés » par la ville centre. On se presse et on ferraille au comptoir de « l’épicerie métropolitaine » alors que les enjeux sont sans doute ailleurs, entre acceptation des réalités et indispensables dépassements. Il est temps de faire fi  des frontières et des chapelles pour engager une dynamique de « fabrique métropolitaine » qui rime avec créativité, innovation ouverte et citoyenneté, un processus continu dans lequel chacun trouve sa place.

Accepter le réel
Il faut d’abord rappeler quelques points essentiels. Tout d’abord, Grenoble n’est pas une exception. Dans notre vieux pays de France sans véritable tradition urbaine, toutes les agglomérations sont à la recherche d’une nouvelle concordance entre l’urbs et la civitas, de nouvelles relations entre les centres et les périphéries et d’une masse critique leur permettant d’exister sur les cartes d’Europe. En clair, tous les gouvernements urbains courent après leur banlieue et tentent de s’aligner sur les nouveaux critères du marketing territorial.  Tous cherchent à répondre aux besoins de la population locale et à renforcer leur attractivité. Tous sont écartelés entre le « care » et le « ranking »
Second point : dans les faits, Grenoble est déjà une métropole fonctionnelle discontinue, c’est-à-dire une « ville au-delà de la ville », une entité urbaine qui attire chaque jour des dizaines de milliers de personnes qu’elle rejette en soirée loin des limites administratives communales dans une gigantesque pulsation. Grenoble est une métropole sous tension comme une autre, une entité urbaine qui rencontre les problèmes de toutes les agglomérations de cette taille avec cependant des contraintes supplémentaires liées à la topographie.
Dernier élément : l’accord métropolitain négocié entre collectivités sera nécessairement imparfait et éphémère tant les territoires, les temps et les mobilités de nos contemporains sont labiles. Périodiquement convoqués au chevet de la ville pour définir les nouveaux « territoires pertinents », les géographes savent les limites d’un exercice sans cesse recommencé.

Changer de regard
Passée ce travail de « banalisation métropolitaine », Grenoble doit changer de regard sur elle-même. Elle doit penser ses temps et ses espaces, s’imaginer comme un système de flux et non comme un système de stocks où chacun se crispe naturellement sur ses acquis. Elle doit prendre conscience que la richesse vient aussi des marges tant spatiales, culturelles, sociales, économiques que temporelles. C’est là que se trouve une part de l’énergie, de la créativité et de l’innovation métropolitaine.
Grenoble doit dépasser la question centre-périphérie pour construire une réflexion plus équilibrée en termes de co-développement. Confrontée à un devoir d’innovation qui la renvoie à ses nobles traditions, Grenoble ne doit pas se crisper devant l’enjeu en mettant la barre trop haut et en imaginant que le monde entier a les yeux rivés sur la « capitale des Alpes », guettant la réponse du « laboratoire grenoblois » aux problèmes de développement soutenable. Personne ne nous attend. Nous pouvons donc oeuvrer sans peur d’expérimenter et de nous tromper. Se penser comme un « laboratoire d’excellence » peut parfois être inhibant, impressionner plutôt que stimuler. Le mieux est l’ennemi du bien. Grenoble doit être fière de son passé mais ne pas s’enfermer dans la litanie des innovations passée tant en matière de mécanique, de technologie que de dynamique sociale.
La métropole doit prendre conscience que les solutions en termes de développement durable ne se trouvent pas seulement du côté des infrastructures et des technologies mais aussi du côté des usages et de l’organisation de la société métropolitaine. Elles peuvent et doivent émerger de démarches d’intelligence collective et de mobilisation de l’expertise citoyenne. La métropole c’est d’abord une nouvelle façon de penser et de vivre ensemble hors les murs et hors les bornes. C’est dans la « fabrique métropolitaine », cette capacité de co-construire la « ville au-delà de la ville », que Grenoble peut et doit innover. Cette innovation territoriale est à la foi un défi et un formidable moteur.

Luc Gwiazdzinski

Imaginer une métropole augmentée

Par Luc Gwiazdzinski
 
La « fabrique métropolitaine » n’est pas qu’une question mécanique et quantitative de dépassement de limites administratives et d’accroissement du nombre d’habitants. C’est d’abord et avant tout une démarche qualitative et hors les murs, un processus continu permettant d’imaginer les contours d’une « métropole augmentée ».

Enchanter le territoire
Face à la demande de réassurance d’une population en mal de repères, il est nécessaire de construire une « figure territoriale » même imparfaite, dans laquelle peuvent se développer les enjeux, s’élaborer les stratégies et se définir des politiques. L’invention du territoire a des bienfaits qui dépassent les seuls aspects technico-administratifs. Au-delà du nouveau mécano institutionnel et du projet métropolitain qui devront naître d’un travail collectif, il faut « éditorialiser » la métropole, définir un « grand récit » qui donne du sens, construire une « figure métropolitaine partagée » qui permette de travailler ensemble. Il faut construire un « imaginaire métropolitain » qui dépasse celui de « la métropole subie des encombrements et des pollutions ».
En ce sens le ré-enchantement du lien entre la ville et la montagne est indispensable, obligeant à changer d’échelle et à prendre de la hauteur. La relecture des multiples apports des immigrations italienne et maghrébine est une autre nécessité. Si la Tour Perret est un symbole architectural de la métropole, il faut alors la restaurer au plus vite. Le téléphérique qui mène au haut-lieu de la Bastille est sans doute plus signifiant pour les Grenoblois et les visiteurs. Dans ce cas les projets de transport par câbles qui resurgissent sont essentiels.
Au-delà des seuls arguments techniques et financiers, ils contribueront au renforcement d’une identité métropolitaine en mouvement par le lien avec l’industrie et les savoir-faire régionaux, par la mise en scène ludique et touristique de la métropole des hauteurs, par l’émergence d’un « cinquième paysage » (après le bâti urbain, l’Isère, l’autoroute et la montagne) et comme symbole lisible et fonctionnel du lien revivifié entre ville et montagne. Il faut choisir cette route haute, rendre la métropole désirable, l’érotiser, écrire une feuille de route qui rassemble et lui donner de la chair en ouvrant quelques chantiers à la hauteur des ambitions.

Ouvrir des chantiers
Il faut d’abord faire tomber les frontières entre recherche et expérimentation, citoyens et décideurs pour construire un écosystème métropolitain, à partir d’une « plate-forme territoriale d’innovation ouverte » qui croise les compétences de différents acteurs : collectivités, entreprises, associations, créatifs et citoyens autour de l’idée de « métropole augmentée ».
Un territoire qui se développe, qui attire et où chacun se sent bien est un territoire organisé où l’on se rencontre. En ce sens, Grenoble doit s’attacher à définir une nouvelle « métropolité », c’est-à-dire une urbanité particulière à cette échelle qui passe par la définition d’espaces publics et de lieux de rencontre de qualité (places, cheminements…) mais également par la définition de grands moments métropolitains, de grands événements qui permettent à des hommes et des femmes aux emplois du temps et aux territoires vécus éclatés, de « faire métropole ».
Elle doit sculpter des temps communs, construire un « urbanisme des temps » en soignant également ses saisons, ses dimanches, ses nuits, tous ces temps particuliers qui font aussi la dynamique et l’identité d’un territoire. Face aux embouteillages, elle peut répliquer par un « pacte de mobilité » qui joue sur les horaires de travail. Face à l’absence d’espace, elle doit penser ses bâtiments et ses espaces publics en termes de modularité, de malléabilité et de polyvalence en évitant de traduire la moindre demande de service en nouvel espace consommé.
Grenoble doit prendre soin de celles et ceux nombreux qui viennent d’ailleurs pour étudier, travailler ou se divertir mais votent ailleurs, là où ils dorment. Elle doit imaginer de nouvelles formes d’association de ces habitants temporaires à la vie de la métropole en développant une « citoyenneté éphémère ». Elle doit également se doter d’une politique touristique qui associe les touristes à la construction du territoire.
Plus que de limites strictes, Grenoble a besoin de définir des « projets d’intérêt métropolitains » qui permettent de focaliser les énergies sur de vraies ambitions collectives.  Elle doit se doter de « compétences métropolitaines » sur des politiques à cette échelle comme les transports ou l’environnement par exemple.
Il faut éviter de transformer les nouvelles limites en frontières en développant les coopérations à différentes échelles de la région à l’Arc Alpin. Enfin et surtout, construire une métropole augmentée, nécessite de connaître et de prendre soin  des « métropolitains » ces être étranges et mal connus qui vivent là, à cette échelle. Vous, moi et tous les autres.
Les quelques pistes proposées font partie d’un plaidoyer pour un large débat autour de l’idée de « métropole augmentée », l’envie d’une réflexion qui dépasse les bornes autour d’un territoire pensé comme une « plateforme d’innovation ouverte », sans chapelles, ni frontières. Un petit territoire du Jura nous a prévenus : « le Haut-Saugeais n’a pas de frontières, ce sont ses voisins qui sont bornés ».

Luc Gwiazdzinski

jeudi 17 mai 2012

Géographie

La géographie (du grec ancien γεωγραφία – geographia, composé de "η γη" (hê gê) la Terre et "γραφειν" (graphein) décrire) est l'étude de la planète, ses terres, ses caractéristiques, ses habitants, et ses phénomènes. Une traduction littérale serait « décrire ou à écrire sur la Terre ». La première personne à utiliser le mot « géographie » était Ératosthène (276-194 avant J.-C.) pour un ouvrage aujourd'hui perdu mais l'arrivée de la géographie est attribuée à Hérodote (484-420 avant J.-C); aussi considéré comme étant le premier historien. Pour les Grecs, c'est la description rationnelle de la Terre. Il s'agit d'une science qui répond à une curiosité nouvelle, et qui va déterminer la géopolitique en définissant les territoires à conquérir et à tenir. Pour Strabon, c'est la base de la formation de celui qui voulait décider.